Appel à contribution – Bien consommer. Les consommations légitimes dans les villes médiévales (XIIe-XVIe siècles) 

16 et 17 novembre 2023, Sorbonne Université et Université Gustave Eiffel

La consommation, soit l’usage de biens valorisables, n’obéit pas au hasard. Entre habitude, norme et légitimité implicite, elle présente des régularités. Socialement classée et classante, elle traduit des stratégies plus ou moins conscientes d’imitation ou de distinction. Les autorités laïques, ecclésiastiques, et jusqu’au cœur de la cellule domestique, s’emploient à la réguler, selon des principes et des valeurs éthiques qui construisent aussi un ordre socio-politique et ecclésial. La valeur d’échange des biens consommés est liée, suivant des dynamiques complexes, à ces valeurs morales et socio-politiques. La légitimité à consommer les biens à haute valeur économique, morale, éthique, sociale et politique, est ainsi distribuée inégalement. Inversement, dire la norme en valorisant et régulant les consommations est un effet et une forme du pouvoir.

Au cours des derniers siècles du Moyen Âge, s’approprier cette capacité à tracer la frontière entre indispensable et superflu devient un enjeu de pouvoir de plus en plus crucial, en particulier dans les mondes urbains. Les villes, en plein essor en Occident à partir des XIe-XIIe siècles, places de marché du monde féodal, sont les hauts lieux d’une consommation intense et diversifiée, de plus en plus dépendante des productions extérieures. Les villes concentrent aussi de plus en plus les pouvoirs qui s’emploient à réguler cette consommation : clergé, pouvoirs communaux et princiers, tous s’implantent en ville, la marquent, la produisent, générant des consommations spécifiques. À chaque type d’urbanité correspondent ainsi des formes et des normes de consommations distinctes, implicites et explicites. La définition de la consommation légitime est une lutte de classements. Ses enjeux, ses modalités et ses effets sont à interroger, de la réforme grégorienne, suivie de l’essor des ordres mendiants, à la Réformation, de l’essor des villes à la « révolution de la consommation », du premier âge communal au temps des États territoriaux et princiers,

Pour ce faire, toutes les sources sont à envisager. On pense bien sûr aux sources normatives et théoriques explicites : règlements et lois somptuaires, protocoles, textes théologiques, serments et sermons, corpus littéraires… Toutefois, un enjeu majeur de ces journées d’études est d’étendre la réflexion à toutes les formes de normativité, de production de valeur et de légitimité implicites, qui ne sont pas nécessairement évidentes à la lecture. Les sources dites de la pratique, comptes, livres de raison, chartes, cartulaires, actes notariés, sources fiscales, judiciaires et annonaires… pourront ainsi être relues en ce sens : quelles « normes pratiques » expriment-elles ? Une attention particulière pourra être portée à la matérialité de ces sources, elles-mêmes biens de consommation et outils de sa gestion. Cela vaut plus encore pour les objets, précieux ou non, œuvres d’art et bâtiments, conservés dans des églises et musées ; mais aussi pour tous les vestiges archéologiques (contenants, vaisselle, restes organiques) susceptibles de documenter des consommations légitimes ou des écarts à ces normes.

Modalités de contribution

Ces journées d’études sont ouvertes à toutes les disciplines et champs d’études concernés par la période (histoire, archéologie, iconographie, histoire de l’art, etc.). Les communications se feront en français ou en anglais. Les intervenant·e·s seront invité·e·s à s’exprimer et à présenter des réflexions sur leur(s) cas d’étude pendant vingt minutes suivies d’un temps de discussion et d’échanges.

Un résumé de la communication d’une page au maximum ainsi qu’un CV sont à envoyer avant le lundi 10 avril 2023, à consommationslegitimes@gmail.com

Comité d’organisation

Marie Fontaine–Gastan (Université Gustave Eiffel)

Solène Minier (Sorbonne Université)

Comité scientifique

Isabelle Chabot (Università degli Studi di Padova)
Élisabeth Crouzet-Pavan (Sorbonne Université)
Giuliano Milani (Université Gustave Eiffel)
Frédérique Lachaud (Sorbonne Université)
Judicaël Petrowiste (Université Paris Cité)
Matthieu Scherman (Université Gustave Eiffel)
Ilaria Taddei (Université Grenoble Alpes)

A propos RMBLF

Réseau des médiévistes belges de langue française
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